Pierre-Claude de la Fléchère (1722-1790) 

Seigneur de Symond, de Châtillon et de Sierne, puis comte de Veyrier. Promoteur de l’érection de la ville de Carouge et grand défenseur des minorités.

Pierre-Claude DE LA FLÉCHÈRE est né le 7 février 1722 au château des Terreaux (dit aussi l’ancien Châtillon) situé sur la commune d’Etrembières (autrefois dans le Royaume de Sardaigne, aujourd’hui en France).

Il est issu d’une des plus anciennes et illustres familles de la noblesse savoyarde qui, selon le Comte Amédée de Foras, auteur de l’Armorial Nobiliaire de Savoie, pourrait provenir d’Ecosse sous le patronyme de Flescher.

Établie à Saint-Jeoire au cours du XIIIe siècle, dans l’actuelle Haute-Savoie, elle construit le château de Beauregard, place forte qui contrôle l’accès à la vallée de la Risse, et s’llustre à plusieurs reprises dans l’histoire de la Savoie, notamment en participant en 1366 à la Croisade d’Orient à l’occasion de laquelle le Comte Vert accorde des bandes blanches peintes sur la partie haute des murs du château de Beauregard, distinction encore visible de nos jours.

Plus tard, le mariage d’un des descendants – François-Marie – qui épouse en 1654 la nièce du prince évêque de Genève – Jean d’Arenthon-d’Alex – scelle définitivement l’union de cette famille avec les plus hautes instances de la noblesse savoyarde.

Le Château de Veyrier. Lithographie de Charles du Bois Melly, 1880.

Le Château de Veyrier. Lithographie de Charles du Bois Melly, 1880.

Pierre-Claude de la Fléchère, qui réside encore au Châtillon, achète en 1770 la seigneurie de Sierne pour 2.600 livres. Il obtient de ce fait l’unification de ses terres et, par la grâce de Charles-Emmanuel III, l’érection du comté de Veyrier le 20 avril de cette même année. Entre-temps, il a déménagé et fait construire dès 1769 le château de Veyrier, une belle bâtisse rectangulaire abritant une quinzaine de salles. En 1772 il rénove l’église de Veyrier en bénéficiant d’une subvention de 4000 livres versée par le roi, puis améliore les voies de communication et assèche les marais. Il fait enfin construire le pont de Sierne en 1782 pour enjamber l’Arve.

Le Pont en bois de Sierne. Collection la Mémoire de Veyrier

Le Pont en bois de Sierne. Collection la Mémoire de Veyrier


Victor-Amédée III. Huile sur toile, Mairie de Carouge.

Victor-Amédée III. Huile sur toile, Mairie de Carouge.

En 1775 il obtient du roi Victor-Amédée III des privilèges pour favoriser l’essor économique du territoire de Carouge, cédé en 1754 au Royaume de Sardaigne par la République de Genève. Principal promoteur de l’érection de la ville de Carouge, il va concrétiser son projet par la mise en place d’un concept politique particulièrement libéral et novateur pour l’époque qui s’appuie sur les édits de tolérance promulgués par le roi Victor-Amédée III. Ainsi, en 1783, les Francs-maçons et les protestants, puis les Juifs en 1787, bénéficeront de l’application du droit commun, ainsi que d’une totale liberté de culte, bien avant les effets émancipateurs de la Révolution française, faisant de Carouge un cas unique en Europe.

Maison du Comte de Veyrier à Carouge abritant la Synagogue. Dessin collection Cottier, Archives de Carouge.

Maison du Comte de Veyrier à Carouge abritant la Synagogue. Dessin collection Cottier, Archives de Carouge.

L’un des actes les plus significatifs sera le prêt par M. de la Fléchère de sa vaste demeure seigneuriale de Carouge pour que l’on y fixe une Synagogue et une école juive. Celles-ci seront en exercice à partir de l’année 1789 et fonctionneront jusqu’en 1859, date d’inauguration de la Grande Synagogue de Genève.

Plaque commémorative inaugurée en 2021 sur la façade de la maison du Comte de Veyrier à Carouge.

Plaque commémorative inaugurée en 2021 sur la façade de la maison du Comte de Veyrier à Carouge.

Plaque commémorative inaugurée en 2021 sur la façade de la maison du Comte de Veyrier à Carouge.

Le Comte Pierre-Claude de la Fléchère meurt à Veyrier, au pied de la fontaine de son château, un matin du 2 avril 1790 sans avoir vu se concrétiser son dernier vœu, faire venir à Carouge des Musulmans et y ériger une Mosquée (il soumet cette idée à Turin par écrit le 13 mars 1789). Il nous laisse néanmoins un extraordinaire témoignage des phases de la construction de Carouge grâce à l’abondante correspondance qu’il a entretenu avec le pouvoir turinois et qui a largement été utilisée par de nombreux historiens pour la rédaction de plusieurs ouvrages sur l’histoire de Carouge.

© Jean Plançon/Patrimoine juif genevois – 2021