Histoire du Lien d’Israël:

Association d’entraide juive genevoise.

C’est dans la cité de Calvin, en juin 1890, que sous l’impulsion du futur Grand Rabbin de Genève Sigismond BALIZER et de quelques membres de la C.I.G. (Communauté israélite de Genève) va prendre naissance la Société d’entraide juive « Le Lien d’Israël ».

Elle est la deuxième institution du genre après celle des « Filles d’Esther » – créée quelques années plus tôt, en mars 1863.

Sigismond Balizer

Buts de l’institution.

Le but de cette institution, qui est alors indépendante de la C.I.G., était de répondre plus efficacement aux besoins d’une population juive qui à cette époque ne cesse de croître à Genève. En effet, jusque là, la majeure partie des actions à caractère social, comme l’aide aux nécessiteux, l’accompagnement des familles endeuillées, les visites aux malades, ou encore les oeuvres de bienfaisance, était du seul ressort de la Communauté en tant qu’unique institution représentative du judaïsme genevois. Seule l’association des « Filles d’Esther » apportait une aide complémentaire à toutes ces actions – en déléguant notamment une partie de ses membres (exclusivement féminines) pour assurer le rôle de la Hevra-Kadicha (la Confrérie Sainte) chargée de rendre les derniers devoirs aux défunts.

L’Assemblée constitutive

Le 14 juin 1890, l’Assemblée constituve du Lien d’Israël se réunit et nomme un Comité formé de sept personnes pour assurer la gestion de l’institution. La présidence échoit à M. Alfred SIMON, et la trésorerie à M. Sylvain BRUNSCHWIG.

Il est à noter que les statuts prévoient que le Grand-Rabbin de Genève (à cette époque Joseph WERTHEIMER) bénéficie d’office du titre de Président d’honneur, une distinction également accordée à certains membres pour « services rendus ».

Le Lien d’Israël aura notamment pour tâche: « … de resserer les liens entre coreligionnaires et de leur offrir une assistance morale en cas de besoin, d’assurer les visites aux malades et aux personnes âgées, et de secourir les personnes indigentes ».

Au delà de ces missions, le Lien d’Israël aura également à charge d’assurer le rôle permanent de la Hevra Kadicha (se substituant ainsi en bonne partie aux missions exercées jusque là par la C.I.G. et les Filles d’Esther). C’est dans ce cadre que le Lien d’Israël sera chargé d’aviser les membres des dates de leur Jahrzeit (date d’anniversaire et de commémoration d’un décès – selon le calendrier hébraïque).

La création d’une Mutuelle

En se développant, le Lien d’Israël va ajouter quelques autres activités. C’est ainsi qu’il crée une Mutuelle à laquelle les membres peuvent avoir recours en cas de maladie grave ou de malheur dans la famille. Cette structure, officialisée en 1891 et inscrite au Registre du Commerce, fonctionnera jusqu’en 1957, année où l’institution doit adopter de nouveaux statuts pour se conformer à la législation.

Quand le Lien d’Israël devient mécène.

En 1898 l’institution compte déjà 101 membres actifs qui lui permettent de disposer de subsides substantiels. C’est ainsi qu’elle subventionne à partir de l’année 1900 l’orphelinat de Bâle qui avait été créé par le Grand Rabbin WERTHEIMER.

En 1902, le Lien d’Israël accorde une subvention annuelle de Frs. 500 au Docteur Aimé SCHWOB, remarquable médecin qui soigne gratuitement et inlassablement de nombreux coreligionnaires en difficulté.

Au cours de la Première Guerre Mondiale, alors que de nombreux réfugiés affluent vers Genève, le Lien d’Israël et la C.I.G. sont largement sollicités. Simon BRUNSCHWIG et Joseph GAISMANN, membres des deux institutions, sacrifient souvent leur repos de fin de semaine au profit des déshérités. C’est ainsi que chaque dimanche ils se rendent rue de Berne et rue Calvin où deux stands sont montés pour distribuer vivres et secours. Ils sont efficacement épaulés par deux autres membres que le Lien d’Israël délègue à chaque occasion.

Ce type d’opération sera renouvelé, à une échelle beaucoup plus importante, au cours du second conflit mondial.

L’arrivée de réfugiés civils à Genève en 1915. Archives municipales de Lyon, rés. 147133

Le Lien d’Israël au secours de la C.I.G.

En 1930, la C.I.G. projette la construction d’un Oratoire au cimetière israélite de Veyrier. Les travaux, conduits par l’architecte Julien FLEGENHEIMER, posent cependant de sérieux problèmes de trésorerie car les coûts de réalisation s’élèvent à plus de 94’000 francs, une somme relativement coquette à l’époque. C’est finalement le Lien d’Israël qui apporte une solution salvatrice au financement en accordant un emprunt à la C.I.G. sous forme d’obligations remboursables sur 10 ans.

L’Oratoire israélite de Veyrier en 1931. Archives du Centre d’iconographie genevoise.

En 1950, puis en 1965, le Lien d’Israël finance encore une partie des travaux d’extension de l’Oratoire israélite afin d’y établir un centre funéraire équipé de chambres froides. C’est à cette époque que l’institution cède ses attributions relatives aux opérations funéraires à la toute nouvelle société « EZRAH » qui prend désormais en charge le rôle de la Hevra Kadicha. Le Lien d’Israël continuera cependant à aviser ses membres de la date de leur Jahrzeit (ce qui est encore fait de nos jours).

En 1976, il est question de faire fusionner le Lien d’Israël avec Ezrah en une seule institution car leurs activités sont quelquefois similaires. Mais le projet n’aboutit finalement pas et c’est dans le cadre d’un concordat que l’on répartit les tâches de chacun. Dans les années qui suivent, les deux intitutions vont collaborer étroitement pour apporter leur aide à la C.I.G. C’est ainsi qu’elles financeront une partie des extensions du cimetière en 1984.

Une vénérable institution au service de tous les Juifs de Genève.

Après plus de 125 ans d’existence, le Lien d’Israël peut non seulement s’énorgueillir d’être une des plus anciennes institutions d’entraide juive à Genève, mais certainement aussi une des plus appréciées parmi les membres d’une communauté qui aujourd’hui est certes multiculturelle et très diversifiée, mais qui reste cependant attachée aux valeurs et aux traditions que cette vénérable institution à su maintenir efficacement tout au long de son parcours.

Dossier réalisé par Jean Plançon.

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